
Les producteurs laitiers de la Gaspésie vivent des années de « vache maigre » alors que la hausse marquée du prix des intrants pour produire a un impact majeur sur la liquidité des entreprises.
« Le principal élément qui est ressorti est la difficulté des entreprises alors qu’on a une crise des revenus et une augmentation des dépenses. Ce sont deux choses que l’on vit alors que le timing n’est pas nécessairement bon », mentionne le représentant régional des Producteurs laitiers du Québec, Normand Barriault, en marge de leur assemblée générale annuelle lundi à New Richmond.
Et l’année 2023 ne s’annonce pas mieux alors que le coût des intrants n’a pas diminué.
« En 2023, certains devront renouveler des prêts qui arrivent à terme. On était avec des prêts à 3 % ou 3,5 % et là, on va tomber à peut-être du 6 % ou 7 % en intérêts. Ça va venir encore plus affecter nos liquidités », rapporte M. Barriault qui affirme avoir vécu sa pire année à vie à ce chapitre.
Il cite en exemple que pour l’année 2021 (juillet 2021 à juin 2022), le coût des carburants a atteint 57 000 $. Pour la première partie de l’année en cours (juillet 2022 à décembre 2022), la facture atteint déjà 50 000 $.
« Oui, on a eu des augmentations au niveau du prix du lait, mais jamais pour compenser ces soubresauts de ces intrants qui nous frappent de plein fouet », soutient l’agriculteur.
La situation actuelle amènera les producteurs à se tourner vers les paliers de gouvernements pour les sensibiliser non seulement en agriculture, mais pour tout le secteur primaire de l’économie.
« C’est l’autre étape qu’on aura à faire de rencontrer nos élus pour les sensibiliser au secteur primaire : autant la pêche, l’agriculture, la forêt sont touchés par l’explosion des coûts et on ne peut refiler totalement aux consommateurs », explique le producteur de Carleton-sur-Mer.
Sans parler de subventions directes à la production, ce qui pourrait aller à l’encontre des marchés internationaux, il évoque par exemple des subventions salariales pour soutenir l’industrie.
Les gens changent leurs habitudes de consommation mais les produits laitiers demeurent importants dans leur alimentation.
« C’est en soi une bonne nouvelle. Ils boivent moins de lait et mangent plus de produits finaux comme le fromage ou du yogourt. Ce sont des produits intéressants pour nous, mais moins que le lait de consommation comme revenus », mentionne M. Barriault.
Ottawa a consenti une ouverture de 17 % des marchés avec les différents accords internationaux conclus avec l’Europe, le nouvel accord Canada-États-Unis-Mexique et Transpacifique.
« Imagine si on n’avait pas eu ces concessions, ça aurait été formidable. Mais malgré tout, il y a une croissance des marchés à l’heure actuelle », dit-il, espérant que le projet de loi C-282 qui bloquerait de nouvelles concessions en agriculture soit adopté par les Communes.
La Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine a perdu un producteur laitier dans la dernière année. La région en compte maintenant 12 mais un nouveau venu est sur le point de se lancer à Nouvelle.
« La conjoncture économique reste complexe : les coûts de construction ont explosé, la hausse des taux d’intérêts, ces facteurs pourraient amener un effet négatif sur la rentabilité du projet. J’espère qu’il va partir quand même, mais c’est au producteur de voir s’il peut le faire en 2023 », espère M. Barriault.
Des discussions se tiennent pour ajouter un nouveau producteur aux Îles-de-la-Madeleine, mais il doit obtenir une permission de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec puisque les besoins de production sont particuliers dans l’archipel.
Malgré la perte d’un producteur, les autres fermiers ont pu racheter des droits de produire et même davantage. Les producteurs laitiers gaspésiens n’auront pas de priorité d’acquisition pour 2023 face à ce constat sur la scène québécoise.
« Les producteurs qui restent sont actifs dans l’achat ou la progression de leur entreprise. Ce n’est pas tout noir, ni blanc. Si on a le lancement d’un producteur, ce serait une bonne nouvelle », dit-il.